Vous avez dit « disruption » ?

24 janvier 2019 - Carré Frais #167

Vous avez dit « disruption » ?

# De quoi parle-t-on vraiment ?

Il n’est pas facile de définir la disruption, notamment selon le contexte où le terme est employé : en science il s’agit d’un court-circuit, en économie d’une innovation de rupture, en management d’idées non conventionnelles, en communication d’une méthodologie…
Venant du latin, « disruption » qui signifie : rupture / brisure / cassure, nous aimerions simplement dire qu’il s’agit d’un sérieux changement et que ce dernier s’applique à tous les secteurs. Mais bon nombre d’économistes, professeurs, chercheurs et publicitaires se battent depuis les années 90 pour apporter leur juste définition de la disruption, créant ainsi le flou dans nos esprits d’innovateurs en devenir. Et si, la disruption n’était finalement devenue qu’une façon de penser, d’agir et de créer ? De Jean-Marie Dru à Clayton Christensen, le champ de la disruption est large mais pas si éloigné.

 

# L’ère de l’économie disruptive  

A la fin des années 90, Clayton Christensen, professeur d’administration des affaires Kim B. Clark à la Harvard Business School de l’Université de Harvard, met en lumière la notion d’innovation disruptive (voir le résumé vidéo de son livre « The Innovator’s Dilemma » – 1997). Nous sommes donc là dans un contexte économique pour penser une croissance basée sur l’innovation. Selon Christensen, la disruption s’applique aux startups, qui décernent des insights sociétaux pour créer de nouveaux besoins et cela, selon trois situations :

  • La création d’un nouveau marché (Apple et l’Apple II, premier ordinateur personnel lancé 1 an après la création d’Apple Computer Inc. – 1976)
  • La création d’un marché low cost (Free et le premier accès à Internet gratuit – 1999)
  • Ou la combinaison des deux (Southwest Airlines, première compagnie aérienne low – 1971)

La définition de la disruption de Christensen se rapporte alors à des entreprises naissantes qui créent des marchés de niche. Et n’aborde pas la disruption technologique, de modèle économique ou encore de process mis en place par les entreprises matures. C’est en cela qu’elle est critiquée et peut-être limitée (lire l’article du Harvard Business Review à ce sujet).

 

# La disruption au service du management des idées

Jean-Marie DRU, président et CEO de TBWA \ WORLDWIDE, voit davantage la disruption comme un processus créatif. Pour ainsi dire, chaque entreprise, peu importe sa taille, est capable de trouver des idées qui casseront les codes, celles qui seront source de rupture créatrice. Il explique la disruption comme une façon de voir demain :

  • Convention : quel(s) constat(s) pouvons-nous faire du marché actuel ? Qu’est-ce qui fige le marché ?
  • Vision projective : où souhaite-t-on aller demain ?
  • Disruption : quelle est l’idée créative qui nous permet d’arriver de façon efficace à notre vision de demain ?

Au travers de plusieurs de ses ouvrages, dont les célèbres “Disruption” (1997), “Disruption Live” (2002) et plus récemment « NEW… 15 approches disruptives de l’innovation » (2016), J.M. Dru donne aux responsables d’entreprises des moyens et des exemples de cas pour pérenniser leur business en bousculant leurs certitudes. La disruption selon lui est « plus qu’un mot, plus qu’un livre, plus qu’une méthode, c’est un mode de pensée ». On partage cette idée qui ouvre le champ des possibles sur de nouvelles opportunités de croissance (voir l’interview de Jean-Marie Dru donné à La Réclame en 2016).

 

Exemples :

Hébergement : Airbnb est venu bousculer le marché de l’hôtellerie classique au travers d’une plateforme 100% digitale de mise en relation voyageurs/hôtes non professionnels, et au travers d’une réelle expérience client. Une disruption tant au niveau des habitudes de consommations du voyage, que du business model numérique de l’entreprise.

 

Luxe : incroyable, mais vrai, le secteur du luxe est l’un des plus disruptifs au monde. En perpétuelle évolution, la force créative du luxe repose sur un élément majeur : ne pas s’appuyer sur les besoins consommateurs pour innover et laisser libre cours à l’imagination des directeurs artistiques pour surprendre ! C’est notamment le cas de la marque Burberry, qui a su redynamiser son image grâce aux réseaux sociaux, au système du “see now by now”, à la mixité des collections hommes/femmes et aux égéries iconiques.

 

Alcool : Absolute Vodka, marque disruptive avant l’heure, a pris le contre-pied des positionnements traditionnels de son secteur en allant taper aux portes de la mode. Boire Absolute, c’est branché. La communication et le marketing de la marque ont fait de la bouteille un élément de distinction sociale (détournement, incrustation au sein de paysages mythiques, habillages collector en guise de packaging, mini-films couture aux bandes-son finement sélectionnées…).

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